Le management visuel : rendre les problèmes visibles… et les partager

246_logo-ILFSens&co, partenaire de l’Institut Lean France a le plaisir de vous faire parvenir la nouvelle e-letter de l’Institut Lean France.
Elle a été rédigée par Michael Ballé, Membre Fondateur de l’Institut Lean France. Bonne lecture

A la dernière conférence Lean en France de Télécom ParisTech (merci au CES Lean Management de nous inviter), les intervenants (que je remercie également pour leur générosité) ont partagé trois superbes exemples de management visuel.
Un service hospitalier a montré que la durée moyenne de séjour a pu diminuer de 20 % en demandant aux cadres de simplement écrire le plan de soin (prévu) de leurs patients jour après jour (lundi, tel examen, mardi, telle visite, etc.) puis d’écrire en dessous le réel (réalisé). Ce simple exercice leur a permis d’observer de nombreux obstacles au bon déroulement du séjour des patients et de résoudre ces difficultés de manière à fluidifier le passage des patients dans les services, ce qui permet au patient de retrouver sa vie normale plus vite et de rester moins longtemps dans un environnement à risque.

Une ingénierie de pointe a montré comment en évaluant les différentes préférences de clients d’origines très diverses, il était possible de faire apparaître des profils clients contrastés : les laboratoires n’ont pas les mêmes préférences en matière d’équipement que, par exemple, les industriels. Cette visualisation simple sous la forme de radar permet aux ingénieurs de voir en quoi leurs développements produit répondent aux attentes de leurs clients, et donc d’identifier les points précis sur lesquels ils doivent faire des efforts.

Le dirigeant d’une association de plus de 6000 adhérents a montré comment un simple kanban dans les bureaux permet de visualiser les projets en cours par rapport à la demande constante de nouveaux projets. Lorsqu’un nouveau projet arrive sur le bureau de quelqu’un alors que les cases libres sont pleines, il faut se poser la question de fond de, soit faire attendre le projet, soit en arrêter un en cours. Cette réflexion au quotidien permet aux permanents de l’association de mieux comprendre la demande de projets qui leur arrive, l’alignement de ces projets avec les priorités de l’association, et, au cas d’espèce de regarder les projets qui n’avancent pas.

Le management visuel n’est pas un élément périphérique du Lean. Le management visuel regroupe un ensemble de techniques qui rendent physique le « Plan » du cycle PDCA. Une grande difficulté du PDCA est en effet non pas de résoudre les problèmes mais de les définir, surtout quand un « problème » est en fait une accumulation de grains de sables tous différents les uns des autres.
Un management visuel approprié permet à tous de voir ensemble l’écart entre ce qu’on avait prévu et ce qui s’est fait, donc de discuter ensemble du pourquoi et finalement d’agir ensemble sur le comment. Peter Senge définit la tension créatrice comme l’élastique qui se tend entre notre vision et la réalité du moment. Maintenir la tension créatrice requiert quatre efforts :

1. Formuler la vision : quelle est notre cible, notre prévu, notre standard ?
2. Ecrire la situation courante : que s’est-il vraiment passé ?
3. Se forcer à confronter le problème (et l’écrire) : pourquoi cet écart ? Quel obstacle avons-nous rencontré ?
4. Se forcer à aller au-delà des éléments de surface : se demander pourquoi jusqu’à se poser des questions de fond. La tension créatrice se résout naturellement dans l’action – si le problème est bien formulé, les équipes essaient spontanément de le résoudre, souvent en prenant des initiatives auxquelles on n’aurait pas pensé à priori.

L’objet du management Lean est d’utiliser les outils visuels pour comprendre, pas appliquer. Une fois que les gens ont compris ce qui leur arrive, ils s’attaquent d’eux-mêmes à la résolution du problème pour peu qu’on les accompagne sur ce qui est possible, ce qui reste impossible et ce qui n’est pas impossible. En revanche, profiter de cette source d’initiative et de créativité requiert d’abandonner les vieux réflexes de management « faire faire » et de faire particulièrement attention à ne pas se servir des outils visuels comme d’outils d’application (et de pression).
Le but d’un leader Lean est de développer d’autres leaders, et non pas de développer plus de suiveurs.

Plus d’information sur le site de l’Institut Lean France